« Trop gentille avec ses patientes »

Il y a quelques jours, je discutais avec une gynécologue particulièrement attentive aux droits du patient. Rien selon elle ne justifie que l’on oblige un patient, et à fortiori une femme qui accouche, à quoi que ce soit. Cette gynéco d’ailleurs est très souvent critiquée par ses collègues, sur le mode « c’est bien gentil les principes mais quand il y a urgence, il faut bien… » Ce à quoi elle répond « non, nous n’avons aucun droit de forcer une femme à subir une intervention à laquelle elle n’a pas donné librement son consentement ». Cette attitude – conforme à la loi belge du 22 août 2002 relative aux droits du patient – reste largement incomprise par ses collègues qui la jugent « trop gentille avec ses patientes ».

Hier j’ai reçu dans mon salon de doula une jeune femme, enceinte pour la deuxième fois. Il y a 5 ans elle a donné naissance à une petite fille. C’était un bébé en siège. Elle devait avoir une césarienne programmée mais elle a rompu sa poche des eaux un jour plus tôt. Elle a donc eu une césarienne d’urgence. L’expérience l’a profondément traumatisée. Dès son arrivée à l’hôpital et jusqu’à la naissance de sa fille, jamais elle n’a été consultée à propos des interventions qu’elle subissait. Et non seulement elle n’a jamais été consultée mais en réalité elle n’a même jamais été informée des actes médicaux qu’elle subissait. Je répète « subissait » puisque dans ce cas c’est bien de cela qu’il s’agit. Le verbe aurait pu être différent si seulement elle avait été informée de ce qu’on lui faisait et si elle avait pu, comme l’exige la loi, y donner son libre consentement. Là, au contraire, elle a été ignorée, brusquée, tancée et finalement attachée. Oui vous avez bien lu. Attachée. C’était il y a 5 ans. En 2015 donc, pas 1615.

Evidemment je suis profondément choquée de ce qui est arrivé à ma cliente. Mais ce qui me choque encore plus, quand je fais le lien entre ces deux histoires, c’est que lorsque qu’une gynécologue respecte scrupuleusement la loi et les droits humains les plus élémentaires, elle est qualifiée par ses collègues et sa hiérarchie de « trop gentille avec ses patientes ».